Le bornage est une opération technique consistant à déterminer les limites séparant deux propriétés privées contiguës. Le bornage est obligatoire pour le périmètre d’un lotissement ou d’une ZAC. Pour les ventes immobilières, les actes doivent simplement indiquer si un bornage a été réalisé ou pas (art.L115-4 du code de l’urbanisme).
Quel est l’objet du bornage ?
Le bornage vise à délimiter et matérialiser précisément et définitivement des tènements fonciers contiguës appartenant à des propriétaires distincts par des bornes ou par tous repères physiques et durables et entériné par un procès-verbal de bornage relatant la définition des limites et recueillant l’accord des parties (art.646 du Code civil). Il est fréquemment accompagné d’un arpentage qui mesure la superficie réelle des terrains bornés.
Le bornage ne saurait avoir pour objet de délimiter un fonds en indivision ou les parties privatives et parties communes d’un ensemble immobilier soumis au statut de la copropriété.
Quelles différences existe-t-il entre bornage et alignement ?
Le bornage se distingue de l’alignement, qui a pour objet de désigner la limite entre une propriété et le domaine public. L’alignement est fixé unilatéralement par l’autorité administrative, propriétaire de la voie (commune, département ou région), soit par un plan d’alignement, soit par un arrêté d’alignement individuel. Si l’alignement empiète sur la propriété privée, alors l’administration se doit d’acquérir cette aliénation. La demande d’arrêté d’alignement ou de plan d’alignement est gratuite et doit être faîte auprès de la collectivité propriétaire de la voie.
Le bornage a-t-il un effet translatif de propriété ?
Non. Le bornage constate les limites de propriétés existantes au vu d’un faisceau de preuves et/ou d’indices (titre de propriété, marque de possession apparente, facture de travaux, ancien plan, plan cadastral, etc.) conduisant à établir une hiérarchie des preuves. S’il protège la propriété des voisins, il ne produit aucun effet translatif de propriété. L’action en bornage ne saurait donc se confondre avec celle tendant à la revendication de la propriété.
Comment savoir si les propriétés sont contiguës ?
Les propriétés privées sont contiguës, et donc susceptibles de faire l’objet d’un bornage, dès lors qu’elles ont une limite commune. Peu importe que le terrain contigu soit bâti ou non.
En revanche, deux fonds séparés par une limite naturelle tel un cours d’eau – même s’il n’est ni navigable, ni flottable – ne sont pas contigus et ne peuvent donc pas faire l’objet d’un bornage. Il en va de même si les fonds sont séparés par une voie publique ou une ligne de chemin de fer.
Qui peut exercer une action en bornage ?
Le bornage est un droit général accessoire de la propriété immobilière. L’action en bornage peut être lancée par tout propriétaire d’un terrain sans qu’il soit nécessaire de justifier de ses motifs (art.646 du Code civil).
En cas de démembrement du droit de propriété, le nu-propriétaire ou l’usufruitier peuvent décider d’agir en bornage sans l’accord de l’autre.
A quel moment un bornage peut-il être effectué ?
L’action en bornage est imprescriptible (art.2262 du Code civil). Elle peut donc être entreprise sans délai, à tout moment. Elle ne saurait, toutefois, être lancée si un procès-verbal de bornage a déjà été contradictoirement établi et qu’il a définitivement fixé les limites des propriétés contiguës (Cour de Cassation, Chambre civile 3, 26 novembre 1997, n°95-17644), la règle est formulée dans l’adage « bornage sur bornage ne vaut », et cela, même s’il n’a pas fait l’objet d’une publicité foncière.
Par mesure de sécurité, il est fortement recommandé de publier le procès-verbal original afin qu’il soit opposable aux tiers.
Le recours au géomètre-expert est-il obligatoire ?
Le bornage peut être effectué à l’amiable sans la présence d’un tiers, et notamment sans géomètre-expert. Il convient de matérialiser les limites des propriétés par des bornes ou tout autre repère physique et durable (piquets, pierres, pieux, etc.), sauf à ce que le marquage ne soit pas matériellement possible – notamment lorsque le terrain est bâti. L’accord des propriétaires sur la limite de leurs fonds est établi par un procès-verbal de bornage que les parties peuvent rédiger elles-mêmes sans géomètre-expert. La fixation des limites des biens immobiliers est en effet la prérogative exclusive des propriétaires.
Ce procès-verbal doit être considéré comme une convention. Il s’agit d’un contrat qui ne peut plus être remis en cause, sauf à agir en justice pour faire constater sa nullité notamment pour vice du consentement ou erreur matérielle. La publication de ce procès-verbal au fichier immobilier est admise (art.710-1 du Code civil). Elle est facultative, et son absence n’empêche pas ce procès-verbal d’être opposable aux tiers (Cour de Cassation, Chambre civile 3, 9 avril 2013, n°12-13516).
Dans le cas du recours à un professionnel, celui-ci ne peut-être qu’un géomètre inscrit à l’Ordre des géomètres-experts foncier (OGE).
Qui supporte les frais ?
Les frais de bornage peuvent être répartis entre les propriétaires. Dans la pratique, ces frais sont souvent supportés par le demandeur.
A défaut d’accord amiable entre les propriétaires, que se passe-t-il ?
Le propriétaire doit alors ester en justice.
Depuis le 1er janvier 2020, avant toute action judiciaire en bornage, il est obligatoire d’avoir préalablement tenté une procédure de bornage amiable. Une simple lettre recommandée avec accusé réception sans réponse favorable du voisin ne peut suffire. Il convient d’avoir recours à un conciliateur de justice, à une médiation ou à une procédure participative. A défaut le Tribunal pourra refuser la demande de bornage judiciaire et obliger les parties à recourir à l’une des méthodes précitées. Ce n’est qu’ensuite que le propriétaire peut assigner au fond – et non en référé – le propriétaire du terrain voisin devant le tribunal judiciaire compétent dans le ressort duquel les terrains à borner sont situés (art.R.221-12 et R.221-48 du Code de l’organisation judiciaire).
La procédure est orale et la représentation des parties par un avocat n’est donc pas obligatoire.
Comment le tribunal tranche-t-il le litige ?
Le tribunal rend un jugement qui délimite précisément les propriétés.
En pratique, le tribunal judiciaire du lieu du litige désigne un expert judiciaire près la cour d’appel, qui a pour mission d’établir un projet de procès-verbal d’abornement. Ce projet comprend un plan ou un croquis des limites séparatives et mentionne la situation des bornes. Le tribunal statue au vu des éléments de droit et de fait du dossier constitué par les pièces versées aux débats par les parties (titres de propriété, mentions cadastrales, etc.) et ses éventuelles constatations (cloison, grillages, dalles, possession actuelle des terrains) ou celles de l’expert judiciaire.
Son jugement homologue le procès-verbal d’abornement projeté par l’expert, le cas échéant modifié.
Les frais de bornage sont répartis par le tribunal entre les parties ou mis à la charge de la partie dont il aura rejeté les prétentions.
Une fois le jugement rendu, que se passe-t-il ?
Le jugement permet de porter le bornage à la connaissance des tiers. En cas de refus d’une des parties d’appliquer la décision, il appartient à la partie la plus diligente de saisir le juge de l’exécution pour qu’il la fasse exécuter.
Qu’advient-il en cas de dégradation ou de destruction des bornes ?
Il s’agit d’une infraction pénale délictuelle qualifiée d’atteinte volontaire d’un bien appartenant à autrui. Elle peut être punie d’une peine de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende (art.322-1 du Code pénal).
En cas de dommage léger au terrain, l’infraction commise est une contravention de 5e classe sanctionnée par une amende dont le maximum est de 1 500 euros et, pouvant aller, en cas de récidive, jusqu’à 3 000 euros (art.131-13 du Code pénal). Il ne sera possible de réaliser un nouveau bornage que dans les seules hypothèses où les limites fixées par le précédent bornage seraient devenues incertaines compte tenu de la destruction des bornes.
Un bornage s’impose-t-il dans le cas de la vente immobilière d’un terrain ?
Non, toutefois, un contrat réalisant ou constatant la vente d’un terrain à bâtir doit mentionner si le descriptif du terrain résulte d’un bornage (art.L.115-4 du Code de l’urbanisme).
Pour les autres ventes le bornage est facultatif.